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Il n'est pas de montagne plus haute que les marches de l'oubli

Léon Tilleux au Chili

M02 Transandine 2013 de San Antonio de los Cobres (Argentine) a San pedro de Atacama (Chili)
note: message legerement modifie et ajoute de 24 photos
 
 
Chers amies et amis de la transandine 2013,
 
San Pedro de Atacama (Chili), vendredi 25 janvier 2013



Merci a ceux et celles qui ont repondu au premier message envoye de San Antonio de los Cobres en Argentine.  Me voici arrive a San Pedro de Atacama au Chili apres un long et perilleux voyage a travers la cordillere des Andes via le col de Sico.  En vous quittant a l'issue du premier message, je vous exprimais toutes mes craintes quant a cette traversee par une route tres peu frequentee et le long de laquelle je savais qu'il n'y avait aucun endroit d'hebergement ni de ravitaillement possibles.  Aujourd'hui, j'ai la grande joie de vous annoncer que j'y suis arrive au bout de 9 jours difficiles mais combien enrichissants surtout de par les rencontres que j'ai faites.
De San Antonio de los Cobres a Olacapato en Argentine via un col de 4.560 metres

En quittant San Antonio et en disant adieu a Nabor, le gerant du petit hotel ou j'avais passe trois nuits, j'avais dans la tete les renseignements importants recus d'un jeune bresilien qui venait de passer le col de Sico tant redoute et que j'ai croise par hasard alors qu'il arrivait degoulinant sous l'orage qui venait de le surprendre.  Au cours de la soiree passee ensemble, il m'avait decrit les difficultes qu'il venait d'affronter:  pluie, grele, froid, absence de ravitaillement ... mais aussi qu'il etait possible de demander de l'eau aux policiers au poste frontiere et surtout de passer la nuit dans les locaux de l'ancienne mine de mer de El Laco situee du cote chilien.  Affonso, ce jeune Bresilien etait en route pour un long periple de plus d'un an a travers tous les pays des Ameriques.  Il s'arretait dans les petites villes, il demandait l'hospitalite chez les pompiers, a la Mairie ou aupres des institutions religieuses.  A San Antonio, il a partage ma chambre et toutes ses emotions ressenties tout au long d'un voyage exceptionnel.

Pour atteindre Olacapato, j'ai du monter un col de 4.560 metres, le "alto Chorillo".  Apres de frequents arrets sur une route en pierres, a 4 km du sommet, j'ai plante ma tente dans un tournant, extenue, attendant une nuit reposante pour continuer.  Encourage par deux Francais le lendemain matin, c'est avec une tres grande joie que j'arrivais au sommet.  Je pensais que la descente serait facile mais une portion ensablee m'attendait, celle pour laquelle mon ami des Pyrenees, Andre Etchelecou avait loue une voiture.  Mais ce passage difficile fut plus court que prevu.

A Olacapato, je me suis rendu directement au poste de sante.  En effet, le second jour du voyage, en cherchant un endroit pour planter la tente, je m'etais "plante" une longue epine dans le tibia.  N'ayant pu desinfecter la plaie convenablement, je craignais une infection.  Une gentille infirmiere a regarde la plaie et par mesure de securite (il n'y a aucun poste de sante avant 200 km), elle m'a donne des antibiotiques.  Lorsque j'ai voulu la retribuer pour ce service, elle m'a repondu "c'est gratuit" ... meme pour les etrangers!   Ah bon !  C'est pas partout comme cela!
De Olacapato (Argentine) a la mine de fer de El Laco (Chili) :  traversee "apocalyptique" du col de Sico pratiquement desert

En quittant le petit "hospedage" d'Olacapato ou j'avais pu prendre une bonne douche chaude et donner un bon brin de toilette a ma monture (le velo), je partais avec beaucoup d'apprehension.  Le premier jour, en voulant me rechauffer de l'eau, je ne parvenais pas - avec des allumettes qui avaient pris l'humidite - a allumer mon camping gaz.  Moment de panique, je n'avais que des sachets de nourriture lyophylisee et durant 5 jours j'etais certain de ne rencontrer personne.  Petit a petit, j'ai repris mes esprits et mon courage. Au bord du salar merveilleux del Rincon, j'ai reussi a allumer un feu avec des bouts de bois et ... un briquet recu de touristes anglais tout ebahis de rencontrer un cycliste a cet endroit.  Le vent s'etant calme pour planter la tente, je passais une nuit etoilee au bord d'une route sur laquelle aucun vehicule ne vint troubler un silence impressionnant.

Le lendemain samedi 19 janvier 2013, je voyais au loin le col de Sico mais je perdis pas mal de temps a cause d'une portion de boue ... rouge comme le fer de cette region. Nettoyage de la monture et surtout de la chaine! Me voila enfin arrive au poste frontiere Argentin.  Bien recu par les douaniers qui visiblement n'ont guere de travail.  Par precausion, je leur demande des allumettes; n'ayant sans doute pas une boite complete a me donner, l'un deux me donne quelques allumettes avec un petit centimetre carre de la partie destinee au frottement de l'allumette.  Un petit geste mais une bonne intention!

La suite fut moins agreable.  Des le passage du col de Sico qui marque la frontiere entre l'Argentine et le Chili a 4.092 metres, un orage s'annonce.  Bien vite je dois m'arreter et m'abriter comme je peux.  Cela devient "apocalyptique" ... si bien que je crains que les eclairs qui eclatent de partout ne nous (le velo et moi) prennent pour cible.  L'orage s'arrete mais pas la pluie.  Je monte la tente au bord de la route.  Un vehicule passe.  La nuit, en sortant pour un besoin naturel, je suis dans le brouillard total ... je ne vois pas a plus d'un metre. Le lendemain matin, la pluie est omnipresente. Je devine au loin un cycliste : c'est Alejandro, un Argentin qui retourne dans son pays en tirant une remorque.  Brefs echanges; il me confirme que les gars de la mine accueillent les voyageurs de notre espece.

Deux cols m'attendent avant que je ne puisse me reposer.  Le premier est relativement facile etant donne que la pluie s'est arretee.  J'arrive au poste des douaniers chiliens.  Je leur demande de l'eau chaude pour rechauffer un plat lyophylise.  Dans un petit local, nous sommes quatre.  Pas beaucoup de travail pour eux : en moyenne un vehicule par jour a controler.  Ce dimanche 20 janvier, un peu plus de travail :  une voiture argentine ... et deux cyclistes !

Le plus dur etait a venir.  Apres avoir subi le controle du douanier verifiant que je n'avais pas de fruits (d'Argentine, il est formellement interdit d'importer des fruits et legumes - meme pas une banane), je reprends la route.  Mais la pluie drue et froide est la, qui se transforme en neige fondante et puis en neige. J'ai les pieds trempes en traversant des torrents de boue.  Ma monture, elle ne se plaint pas. J'apercois au loin des vigognes (cousines des lamas et alpagas) qui cherchent un peu de nourriture.  Lentement, tres lentement mais surement, j'arrive au sommet du col de "el Laco" ;  mon altimetre marque 4.525m. Je photographie mes pas (ephemeres) dans la neige des Andes! Prudemment j'entreprends la descente.  Arrive a hauteur de la mine de fer, un homme me fais signe de venir avec de grands gestes ... oui, les cyclistes ont les bienvenus!

Une nuit bien au chaud dans les locaux de cette mine de fer desafectee depuis les annes 1980.  Oscar et Jose, sont charges de garder les locaux et ce 365 jours par an ... loin de leur famille.  Heureusement, ils ont tel et Internet pour communiquer. Nous sommes 5 a partager le repas du soir (omelettes aux tomates) :  deux camionneurs argentins passent la nuit egalement dans ces locaux car leurs camions sont restes bloques a cause la neige.  Oscar m'explique que c'est tres rare qu'il y ait de la neige ... j'ai bien choisi le jour !
 
De la mine de "El Laco" a San Pedro de Atacama ... sous un ciel bleu ... et un soleil le plus radieux qu'il soit !

Le lendemain, ciel bleu, soleil radieux.  "Despues de la lluvia y de la nieve ... vien siempre el sol !".  Comme l'ecrivait Ghislaine Wathelet, une cooperante belge que le groupe tiers-monde de Gesves soutenait dans les annes 1980 dans son travail social a Osorno au Chili ... elle avait rasion!  Je ne reverrai plus la pluie (ni la neige) jusque San Pedro de Atacama.  Mais jusque la, la route est encore longue et la route dure avec ses pierrailles.  Trois cols egalement mais de moindre difficulte, tout en depassant chacun les 4.000 m.  Presque pas de vehicules mais des rencontres exceptionnelles ... jugez-en.  La route longe des merveilles (lagunes et salars). Je prends le temps d'admirer les couleurs de ces richesses naturelles et encore preservees de l'intrusion humaine. La chaleur est la aussi ... eau et nourriture commencent a manquer.  Alors que j'etais en train de me demander pourquoi je ne recevais que si peu de messages d'encouragement de mes amis et de mes amies de ma longue liste d'adresses, j'ai tant recu de la part de personnes que j'ai croisees ... que je me suis dis finalement "au lieu de nous plaindre de ce que nous n'avons pas, profitons de la richesse de ce qui nous est donne de la part de ceux et celles qui se donnent la peine de s'arreter et de nous rencontrer dans un esprit de fraternite et d'humanite".

C'est ainsi que, en arretant une ambulance sur le trajet du retour (elle m'avait croise le matin), en leur demandant de l'eau, spontanement, les ambulanciers me donnerent carement leur pique-nique (pain, fromage, jambon) .. alors qu'il leur restait plus de 200 km a parcourir pour rejoindre le poste de sante de Calama.  Le lendemain, un 4x4 s'arrete.  En descend Odile, une jeune guide de nationalite Francaise.  Elle m'apprend qu'elle a vecu quelque temps a Thy-le-chateau en Belgique ... a la communaute "des Beatitudes" !  Elle me promet, qu'au retour, elle me donnera les restes du pique-nique non consommes des touristes qu'elle accompagne.  Quelques heures plus tard, elle s'arrete.  Pendant deux jours je me regalerai de pates au saumon, de feta aux olives ... dans un environnement ou rien de pousse!  Un autre vehicule s'arrete : en me montrant un cadenas pour velo, le chauffeur me demande  " Ne serait-ce pas a vous?" ... moi qui m'etais jure de ne rien perdre au cours du voyage!

En admirant la belle petite eglise au toit de chaume de Socaire, je me fais interpeller par un goupe de touristes.  Precedemment, la plupart des mini-bus remplis de touristes n'accordaient guere d'attention (et reciproquement) a un cycliste roulant sous un soleil de plomb.  J'ai pu reviser mon jugement.  Ce groupe compose de gens parlant l'espagnol, le bresilien et le francais (j'ai pu parler avec chacun d'eux dans leur langue) se sont interesses a mon voyage, au parrainage qui accompagne ce voyage, aux difficultes rencontrees.  Avant de me quitter, apres m'avoir donne des fruits et des noix du Para (Bresil - cela me rappelle de bons souvenirs)), ils me demanderent ce dont j'avais besoin : des encouragements!  En les quittant, ils m'applaudirent, ranges sur deux files et en criant "allez, Leon!".  ... En plus, une des personnes me donna un produit curatif pour les levres durement mordues par le soleil!
 
Pour visiter les lagunes Miscanti et Miñiques, je devais quitter la route principale et emprunter sur 8 km une route horrible en graviers si bien que j'ai cache le velo dans les rochers;  j'ai fait du stop et la premiere voiture s'est arretee.  Quatre jeunes etudiants de Santiago m'ont permis de visiter les belles lagunes au bord desquelles broutent tranquillement de jolies vigognes (voir les photos).  Nous nous sommes retrouves une fois en cours de route et deux fois a San Pedro ... hazard de l'amitie !

Il me restait 90 km sur une belle route asphaltee pour rejoindre San Pedro de atacama.  Changement de decor :  le salar d'Atacama, avec ses couleurs rouge, brun, bleu, blanc, etc ... me suit tout au long de la route par la gauche.  La nuit au bord d'un des salars (lacs de sel asseches, parfois reserves importantes de lihtium) les plus etendus de la planete, est douce et etoilee.  La lune m'empeche cependant de voir beaucoup d'etoiles.  Lors de la derniere journee (jeudi 24 janvier 2013), une rencontre de plus ... inattendue. Un motard fait demi-tour.  Il s'enquiert de savoir si rien ne me manque.  Il me donne rendez-vous a San Pedro pour le repas du soir.  A l'entree de San Pedro, j'ai le loisir, dans la longue file de controle des passeports, d'echanger avec une famille argentine sur l'opportunite d'interdire l'importation de fuits et legumes ... et meme d'un petit cactus ... dans un Mercosur (marche commun entre les pays du cone Sud) qui a tres difficile a demarrer dans les faits !

Premier soir a San Pedro.  Tommy, le Suisse de Zurich, ancien employe de banque, m'invite a souper (un succulent poulet aux champignons) dans un sympathique restaurant de cette ville envahie par de nombreux touristes a majorite francais.  Les extremes se rencontrent :  le randonneur cycliste ... et le motard, passionne de moto longue distance a travers le Perou, l'Argentine, pratiquant la vitesse pure a moto, le marathon en montagne, par ailleurs membre de l'equipe de recherche des egares du Dakar dans les dunes (au fait cette dunes sont-elles vraiment destinees aux camions et aux voitures ?).  Ce vendredi 25 janvier, Tommy repart vers Santiago.  Quant a moi, je prepare l'une ou l'autre excursion a velo et en 4x4.  Un autre defi m'attend : j'envisage de monter au volcan Lascar a pres de 5.000 m. avec un guide et un jeune de 30 ans interesse par le trekking ... en fait, je n'en ai que deux fois plus lui!  Quant a l'altitude, n'ayez crainte ... j'ai l'habitude !

Dans un premier temps, je vous envoie ce message sans photos.  Si l'ordinateur n'est pas trop lent, je vous le renvoie avec en attache quelques photos de cette fantastique traversee des Andes.

Prochain message ... le long de la route vers Santiago.  Il me reste 2.200 km a parcourir ... un peu plus que les 541 km parcourus a ce jour !
Amities.  Leon Tillieux  ... excuses pour les accents manquants... clavier qwerty oblige !
 

25/01/2013
 
 
 


18/02/2013
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