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Il n'est pas de montagne plus haute que les marches de l'oubli

La grande fête de la Tbaski au Sénégal a lieu ce dimanche (15)

 

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Hier vendredi soir, je reçus la visite de mon ami Mamadou Ka du village de Khonkhoma. Il aime venir vers les 18 heures pour prendre le repas du soir avec moi ou avec nous quand Abi est rentrée du travail. Ce moment est à chaque fois un plaisir renouvelé.

Mamadou s'exprime dans un français difficile mais le dialogue passe très bien.

Ce soir au menu de nos conversations : la tout grande fête de ce dimanche 5 octobre la Tabaski.

 

Dans chaque famille sénégalaise, le ou les pères font tuer - sacrifier - un mouton, il n'est pas du tout rare que l'on tue jusqu'à six moutons dans une même famille.

Le programme de la journée débute à la mosquée vers 14 heures, suivi directement de l'abattage des bêtes, rôle dévolu aux hommes, ainsi que la découpe des bêtes... crépitement des machettes de toutes parts... Ensuite, tout est confié aux femmes pour la préparation des viandes, généralement cuites sur feux de bois, dans le village, les fumées se croisent, s'entrecroisent, planent et remontent de plus bel sur le village en fête. Cette fête est essentiellement familiale où les familles se réunissent au grand complet. Pour l'occasion, les femmes se seront fait confectionner leur nouvelle robe, ajusté les tresses ou les perruques, chacune passée par la magie des coiffeuses qui depuis plusieurs jours travaillent jour et nuit!

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On sacrifie un mouton mâle, s'il n'y en n'a pas, on prend un mouton femelle

En cas de carence de moutons, on prend un bouc ou chèvre mâle, ou une chèvre femelle, sans chèvre, on prend un zébu mâle, ou un femelle, s'il n'y en a toujours pas, on peut prendre un chameau ou une chamelle, dans le cas de ne posséder aucun de ces animaux, on est absout de sacrifice...

Cette année le Sénégal aura besoin de 720.000 moutons, les autorités redoutent l'insuffisance pour satisfaire la population: la plupart des bêtes viennent de la Maurétanie voisine, la transhumance est cette année rendue plus difficile par les troubles au Mali voisin...

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L’engouement constaté à l’occasion de la fête de Tabaski au Sénégal traduit l’importance de cet événement religieux aux yeux des fidèles musulmans du pays de la téranga  . Un phénomène qui révèle une image ambigüe du croyant sénégalais, entre dévouement religieux et affirmation sociale.

 

L’Aïd el Kebir, communément appelé Tabaski au Sénégal, est cette grande fête musulmane de commémoration du sacrifice d’Abraham. Au pays de la téranga   où 94% de la population est musulmane et où la pratique religieuse donne beaucoup de crédit au paraître, la possession du mouton est fondamentale, tout comme grand boubou et long chapelet.

Dans ce souci permanent de faire partie des siens, cette tradition prend les allures d’une obligation. Bon nombre de pères de famille victimes de cette psychose s’endettent lourdement afin d’attacher devant leur maison, le jour j, un gros et gras mouton, comme celui ou du voisin, plus gros et plus gras si possible. Telle une rivalité qui ne dit pas son nom, la Tabaski est quelque part aussi une affirmation de sa puissance économique, de son rang social, et même de son statut de polygame capable d’offrir une bête à chaque épouse…

Et pourtant l’Islam n’en a pas fait une obligation. Selon l’imam Malik : « le sacrifice est une sounna et non une obligation, mais je ne soutiens pas celui qui, tout en étant capable de l’accomplir, la néglige. ». Pour l’Imâm Ibn Hazm : « Aucun des compagnons du Prophète n’a affirmé que le sacrifice de l’Aid al-adha était obligatoire. ». Dans le même registre, Tariq Ramadan disait à ce propos que : « Pendant la grande fête, il existe une sunna, un acte recommandé, qui consiste à sacrifier un mouton. C’est un acte recommandé que les habitudes nationales et familiales ont parfois transformé en obligation. Ce n’est pas le cas. C’est une recommandation. De plus, depuis bien longtemps des savants musulmans ont rappelé que l’on pouvait offrir l’équivalent du sacrifice en don d’argent ou de nourriture pour les pauvres ».

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Je quitterai Saly ce samedi après-midi pour prendre le collectif qui me portera à Khonkhoma, demain, je filmerai les fêtes dans les familles, branlement de combat, mise en charge de toutes les batteries (pas d'électricité chez eux) appareils photos, caméra, portables, ordinateur... je passerai cette soirée et la nuit au milieu d'eux à la chandelle...

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04/10/2014
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